20/9/2024

Nightwish - Yesterwynde

Genre : Metal symphonique

Pays : Finlande

Label : Nuclear Blast

Sortie : 09 septembre 2024

Note finale : 4/5

2024 marque le retour des maîtres incontestés du metal symphonique depuis près de 30 ans. Seulement voilà, il y a eu du mouvement dans les rangs de Nightwish depuis la sortie de Human. :||:Nature, notamment, le départ de Marko Hietala, véritable pierre angulaire de la formation remplacé par Jukka Koskinen bassiste de Wintersun, et le passage par une période personnelle très chargée pour Floor Jansen, d’une déclaration de cancer du sein vers la rémission à la naissance de son deuxième enfant. Alors, après avoir été tant chahuté dans son histoire récente (on vous épargne le pédigré intégral de la formation), le navire Nightwish est-il toujours insubmersible ?

Commençons tout d’abord avec ce mot, Yesterwynd. Il vous a probablement intrigué, peut-être vous êtes vous dit qu’il devait s’agir d’un mot emprunté au finlandais, eh bien, pas du tout. Ce mot est inventé de toute pièce par le groupe, afin de laisser à l’auditeur le loisir de créer son propre univers à travers cet album.

Et le voyage démarre, après une petite intro porteuse d’une atmosphère pour le moins mystérieuse et mélancolique, en pleine mer avec « An Ocean Of Strange Island ».  On plonge sans préambule dans les méandres d’un océan tourmenté et puissant. Floor Jansen tient la barre au milieu de ce déchaînement musical. Le rythme est soutenu sans pour autant abandonner la mélodicité qui caractérise Nightwish depuis toutes ces années.

« The Antikythera Mechanism » nous entraîne vers le fonds. L’atmosphère est pesante, lourde, pleine de ressentiment. Ce titre parle de l’humanité, de l’évolution et l’instrumentalisation traduit le caractère solennel du propos.

Sans introduction, Nightwish a décidé d’envoyer valser nos certitudes. La formation est aussi capable d’aller explorer des territoires résolument plus expérimentaux, à l’image de « The Day Of… » et de sa rythmique qui rentre par une oreille et s’imprime dans les synapses. Nightwish semble oublier, le temps d’un morceau, sa couronne de rois du metal symphonique pour s’armer d’une épée et aller combattre les peurs des enfants, proposant un rythme par-là même moins complexe qu’à l’accoutumée. Le constat de l’état du monde est sinistre, certes, mais Nightwish a décidé de laisser la jeunesse s’exprimer à travers ce titre comme des représentants d’un espoir solide pour l’avenir.

Retrouvons avec joie un rythme moins soutenu permettant à Floor d’exprimer tout son talent vocal. « Perfume Of The Timeless » est l’essence même de ce qu'est Nightwish. La puissance mêlée à l’ambiance symphonique, une voix forte et mélodieuse, un soupçon de magie et d’enchantement. Ce titre est une véritable réussite, et il n’est pas surprenant de l’avoir vu choisi pour présenter l’album à venir, il y a déjà des mois de cela. On y verrait presque la continuité du chef d’œuvre qu’est « The Greatest Show On Earth », une ode à la nature et au vivant, néanmoins sans ce côté absolument magistral et spectaculaire qui émanait de ce dernier.

Passons en mode acoustique avec « Sway ». Ce titre ne sera pas sans vous rappeler « The Islander » (Dark PassionPlay). On constate avec joie qu’une voix masculine, celle de Troy Donockley, s’illustre au-delà du simple accompagnement vocal. Il y a quelque chose de profondément mélancolique dans ce titre qui nous captive. Certainement ce côté très folk qui nous transporte dans une fête de village d’un autre temps, où les choses étaient bien plus simples.

Retour en terres sauvages. « The Children of ‘Ata » nous propulse aux îles Tonga, bien que musicalement, on se retrouve parfois plutôt dans une boite disco des années 70/80. Ce titre est dansant, presque guilleret sans pour autant quitter les rivages du territoire de prédilection de Nightwish, qui vient d’ailleurs nous rappeler à l’ordre plusieurs fois. On surfe sur des sonorités nouvelles, certes, mais la planche sur laquelle on se trouve est faite du même bois que celui qui a fait de Nightwish la référence que l’on connait aujourd’hui.

Floor Jansen s’illustre en chanteuse géniale sur «Something Whispered Follow Me », une ballade qui laisse toute la place à l’expression vocale.

On est d’avantage impressionnés par le fond que par la forme de « Spider Silk », bien que le côté jazzy nous interpelle. Tout un titre composé en hommage à une si petite bête, ça a le mérite d’être souligné et de prendre un instant pour apprécier le fait que l’inspiration et la beauté se trouvent dans toute chose (oui, même celles-là, on vous voit les arachnophobes).

« Hiraeth » fait la part belle à la douceur dans un duo entre Floor et Troy teinté de cornemuses et autres sonorités qui nous transportent vers les étendues sauvages de la Grande-Bretagne.

Fin du voyage. Si Nightwish nous avait habitués à des fins épiques dignes des plus grandes aventures, ici, nous nous quitterons au piano / voix sur « Lanternlight ». Un titre qui transpire une tristesse ambiante et moite qui colle à la peau, bien après la fin de l’écoute.

Alors, finalement, ce navire, est-il toujours insubmersible ? Oui, à n’en pas douter, Nightwish est un exemple de régularité et de maitrise. A bord de Yesterwynde, on navigue toujours très loin des débuts de la formation, de l’époque de Tarja et de ses envolées lyriques sans perdre de vue ce qui fait l’ADN de Nightwish, une capacité hors-norme à nous embarquer vers des voyages musicaux. Floor Jansen s’illustre sur des registres plus graves, sombres qu’à l’accoutumée, en cohérence avec un album mélancolique et quelque part assez sinistre. Cela n’est pas négatif, ni positif, il en ira de la sensibilité de l’auditeur. On sera toujours émerveillés par le génie créatif de Tuomas Holopainen qui ne semble toujours pas avoir épuisé ses ressources. Cet album marque la fin de la trilogie de Nightwish dédiée à la nature, et dire qu’on a aimé cette période serait un euphémisme. La formation s’est imposée en véritable citoyenne du monde et porte-parole du vivant, preuve en est encore faite avec Yesterwynde. Finalement, on a l’impression qu’à travers cet album, Nightwish nous dévoile une facette plus mature, peut-être aussi plus meurtrie, comme une recherche de simplicité et d’authenticité dans un monde qui semble perdre de vue l’essentiel. Une parenthèse qui se déroule comme la bande-son d’un film (écoutez bien les premières et dernières secondes de l’album) auquel nous assistons tous à notre niveaux, spectateurs d’un déclin qu’il nous appartient de contrer.

 Annaëlle Moss

Setlist :

  • Yesterwynde - 2:43
  • An Ocean Of Strange Islands - 09:26
  • The Antikythera Mechanism- 5:55
  • The Day Of ...- 4:33
  • Perfume Of The Timeless- 08:12
  • Sway- 04:23
  • The Children Of 'Ata - 05:37
  • Something Whispered Follow Me - 06:39
  • Spider Silk - 06:26
  • Hiraeth - 06:14
  • The Weave - 04:53
  • Lanternlight - 06:07

Lineup :

  • Tuomas Holopainen (claviers, composition)
  • Floor Jansen (chant)
  • Troy Donockley (cornemuse, flûte irlandaise, guitare, chant)
  • Emppu Vuorinen (guitare)
  • Jukka Koskinen (basse)
  • Kai Hahto (batterie)

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