27/9/2024

The Black Dahlia Murder - Servitude

Genre : Death mélodique

Date de sortie : 27/09/2024

Label : Metal Blade Records

Note finale : 4,5/5

Arriver à sortir dix albums est un signe de réussite et de longévité pour n’importe quel groupe. Mais pour The Black Dahlia Murder, ce dixième album est porteur de bien plus de sens encore. En effet, en 2022, le chanteur historique et cofondateur du groupe, Trevor Strnad, s’est tragiquement donné la mort. Les membres restants du groupe ont donc été confrontés à un choix difficile : était-il possible de poursuivre ce projet sans Trevor, qui avait été dès le départ l’âme du groupe et qui pour beaucoup de fans incarnait véritablement TBDM, ou bien fallait-il mettre un terme à une aventure qui se prolongeait depuis plus de 20 ans ?

Conscients que certains fans accueilleraient cette décision avec scepticisme, Brian Eschbach, le seul membre présent depuis les début et co-fondateur du projet, ainsi que les membres restants, ont choisi de poursuivre le projet, sentant que c’était là la meilleure forme d’hommage possible qu’ils pouvaient rendre à Trevor. Reste que cela représentait un défi de taille et que cela impliquait nécessairement de rebattre totalement les cartes.

Pour l’occasion, Brian Eschbach est donc passé au chant et a dû également accroître son rôle en tant que compositeur et parolier. Il a aussi fait appel à Ryan Knight pour prendre la relève à la guitare. Ryan est loin d’être un nouveau venu, puisqu’il avait fait partie de la formation durant plusieurs années avant cela, mais n’avait plus été présent sur aucun album depuis 2015, date de la sortie d’Abysmal. Cette nouvelle configuration, et la présence de non moins de trois guitaristes dans le groupe, ouvre de nouvelles portes et permet d’explorer des sonorités différentes.

Et il semblerait qu’en dépit du poids inévitable que devait faire peser l’absence de Trevor, le processus de création de l’album ait été plutôt cathartique, permettant à chacun de découvrir de nouvelles possibilités et d’exprimer sa créativité :

« J'ai dû m'y plonger totalement, a déclaré Eschbach. Mais en toute honnêteté, il m'a été plus facile d'écrire les paroles pour cet album que la musique des trois morceaux que j'ai composés. Je choisissais un sujet, faisais des recherches et me laissais absorber. Même si je n'avais jamais réellement fait ça avant, c'est venu assez naturellement une fois que j'ai commencé. »

Ryan Knight, de son côté, explique :

« C’était bien sûr un peu étrange qu’il ne soit pas là, car il l’avait été sur tous les autres albums, mais dans le même temps, il y avait une certaine excitation car de nouvelles choses se passaient. Brian est passé au chant et je suis dans le groupe en même temps que Brandon. Je le connais depuis pas mal de temps, mais nous n’avions jamais été dans un même groupe ensemble. Alors cela ouvre de nouvelles portes. Il n’y avait jamais eu deux guitaristes lead, alors on peut faire de nouvelles choses avec ça. Et pour moi, personnellement, c’est très agréable d’être de retour avec les autres, de faire de la musique. J’ai l’impression d’être de retour dans mon élément. Donc, oui, je me souviendrai de la création de tous les albums auxquels j’ai participé, mais celui-ci plus que tous les autres. »

Cependant, le résultat est-il réussi ? Eh bien, selon nous, oui, sans aucun doute. Servitude est un album varié et qui se laisse écouter d’une traite sans jamais décevoir. L’équilibre entre les changements apportés par le nouveau line-up et la volonté de préserver l’esprit et le son caractéristiques de The Black Dahlia Murder est parfait : c’est à la fois nouveau, stimulant, mais sans représenter une cassure qui aurait pu déstabiliser les fans de la première heure.

À ce jour, trois singles ont été proposés au public, reflétant avec efficacité la diversité de Servitude. Le premier, « Aftermath », agressif et direct, est du TBDM pur jus avec son rythme effréné mais qui sait laisser la place à une ligne mélodique très compréhensible, une vraie force de ce groupe depuis toujours, et qui ne se dément pas sur cet album. Côté ambiance, on est dans un monde post-apocalyptique dans lequel les gens finissent par avoir recours au cannibalisme. Fun !

Ensuite, avec « Mammoth's Hand », nous sommes sur un rythme beaucoup plus lent et sur une source qui pourrait à première vue sembler surprenante, puisque Ryan Knight a en partie tiré son inspiration d’une scène d’un film de 1982, The Beastmaster, une épopée qui vaut le détour, si vous avez une affection pour les films heroïc fantasy de l’époque, un peu kitsch mais tellement attachants. Le morceau, lui, n’a rien de kitsch et met parfaitement en valeur les aspects plus « posés » de la musique du groupe.

Concernant le troisième single, « Panic Hysteric », il semblerait qu’Eschbach ait pris beaucoup de plaisir à écrire le texte, qui cite Frank Sinatra et son opinion très tranchée sur le rock n'roll. Selon le chanteur, quelques gouttes d’alcool auraient également contribué à lui donner l’inspiration…

Mais qu’en est-il du reste de l’album ? Eh bien, les morceaux qui n’ont pas encore été dévoilés jusqu’alors sont une véritable tuerie ! Si nous devions vous en recommander quelques-uns, nos choix se porteraient très certainement sur « Evening Ephemeral », qui ouvre l’album avec une efficacité diabolique. Ne vous laissez pas berner par les toutes premières notes tout en douceur, on est bien dans un album de TBDM, et dès que le rythme s’accélère, on n’a qu’une envie, c’est de pouvoir profiter du morceau en live pour se précipiter dans la fosse. Impossible de résister à l’envie de bouger !

En vrac, on peut également citer « Asserting Dominion », terriblement entraînant et entêtant, ou encore « Servitude », qui donne son nom à l’album et « Transcosmic Blueprint », deux morceaux composés par Eschbach, et qui dévoilent un peu plus leur richesse à chaque écoute. L’album s’achève tout en douceur, comme il avait commencé, avec les dernières secondes d’« Utopia Black », mais non sans nous en avoir remis plein la tête une dernière fois !

Le groupe était forcément sous pression lors de la composition de cet album : leur volonté de ne pas décevoir les fans, mais surtout de proposer une œuvre qui serait à la hauteur pour rendre hommage à Trevor Strnad, a nécessairement dû peser dans la balance. Ils ont dû se réinventer tout en conservant l’héritage des années passées et s’exposer à un potentiel rejet des fans. Comme l’a dit Eschbach :

« Nous avons donné tout ce que nous avions, et fait l’album qui nous semblait juste. Je suis fier de lui et fier de nous cinq. On ne peut jamais plaire à tout le monde, mais je sais que cette musique représentera une force positive et guérisseuse pour ceux qui sauront l’accueillir. »

Ryan Knight, a répété cette volonté de proposer une œuvre qui puisse plaire aux fans :

« Même si le mot "Servitude" a une connotation négative, je le vois plutôt dans le sens où on essaye de servir le groupe et son héritage, de se mettre au service des fans pour leur offrir quelque chose qu’ils vont vraiment aimer avec ce disque. Faire quelque chose qui les satisfasse et qui nous satisfasse également. »

Brandon Ellis, guitariste de TBDM depuis 2016, a déclaré que Servitude marquait forcément une nouvelle ère pour The Black Dahlia Murder. À en juger par la qualité de cet album, le pari est pour le moment plus que réussi. Un nouveau chapitre s’ouvre, et il le fait sous de très bons hospices. C’était bien là le meilleur moyen de rendre hommage à Trevor.

Orsola G.

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