LIVE REPORT DE TOTO AU PALAIS DES SPORTS 2024
Texte : Olivier CARLE
Photos : Yann CHARLES
Me voici donc de nouveau au Palais Des Sports/Dôme De Paris 3 mois après l'excellent concert de Joe Bonamassa. Cette fois ce sera pour mon 12ème rendez-vous avec Toto depuis 1982 et le passage de la tournée « IV » à l'Hippodrome de Pantin... Je me réjouissais de retrouver les Américains pour ce « Dogs of Oz Tour 2024 » car leur précédente prestation à La Seine Musicale il y a 6 ans m'avait fortement impressionné. Elle fait d'ailleurs partie du Top 3 de mes meilleurs concerts de la bande à Steve Lukather de ces 40 dernières années. Le concert de ce soir au Palais des Sports ne rejoint pas ce Top 3 mais le niveau musical proposé par les Californiens est tout de même toujours de haute volée...
Quelques réserves sur le line-up tout d'abord. En 2018, pour le « 40 Trips Around The Sun Tour », on avait encore eu droit à la présence des 2 membres originaux aux claviers (et chant) que sont David Paich, certes diminué mais toujours au rendez-vous, et de Steve Porcaro, le dernier survivant des 3 frères, qui paraissait alors tout à fait apte à continuer l'aventure Toto. Steve semble ne pas avoir au final souhaité participer à la seconde reformation de 2020 et le nom de David n'apparaît plus que sur l'affiche de la tournée en cours sous l'intitulé « David Paich Presents... » sans qu'on comprenne très bien ce que cela signifie au final ! En lieu et place de ces deux-là, on assiste au retour de Greg Phillinganes qui a déjà joué le rôle de remplaçant « de luxe » pendant les années 2000 et du jeune de 26 ans Dennis Atlas que leur a recommandé Bumblefoot (Guns'n'Roses), dixit Steve L., lorqu'ils ont eu besoin d'urgence d'un nouveau clavier à l'aube de cette tournée suite au départ de Steve Maggiora. Dont acte, ce nouveau duo de musiciens fait bien le job mais ce n'est plus vraiment le Toto qu'on connaît. Aux percus, changement également puisque le vétéran Lenny Castro n'est pas revenu depuis 2020 alors qu'il était bien là à La Seine Musicale. C'est donc le valeureux Warren Ham qui s'occupe de ce poste en plus du saxo, de la flûte, des choeurs et même de certaines parties de chants principaux. L'avantage pour la prod' c'est que ça fait des économies substantielles de personnel sur scène... L'impressionnant Shem Von Schroeck, bassiste de la dernière tournée, a lui aussi rendu son tablier au profit de l'ancien membre de Huey Lewis & The News John Pierce qui est un ami d'enfance de Lukather, ceci pouvant expliquer cela ! On retrouve donc au final 4 musiciens présents en 2018 à savoir Steve L., seul membre fondateur encore fidèle au poste, Warren qui a pris du gallon, Joe Williams au chant qui a rejoint Toto il y a près de 40 ans pour l'album « Fahrenheit » mais a fait des allers-retours par la suite et le fantastique batteur Shannon Forrest bien connu des amateurs de musique californienne et de country puisque son C.V. est long comme le bras dans le domaine... On sait bien que le line-up de Toto a beaucoup évolué avec le temps mais là ça bouge encore pas mal. Steve L. est bien conscient de cet état de fait et il en parlera d'ailleurs pour expliquer pourquoi le groupe continue à exister malgré tout. En tant que seul maître à bord en 2024, il se sent dans l'obligation de perpétuer l'héritage de Toto car personne ne pourrait le faire à sa place. Au vu du remplissage des salles sur cette tournée, les faits semblent lui donner raison car même si la moyenne d'âge est relativement élevée, certains viennent en famille pour faire connaître aux plus jeunes ce groupe aux 40 millions d'albums vendus...
La set-list maintenant. On attaque avec « Girl Goodbye », judicieux retour aux sources du premier album qui reste encore aujourdhui un disque de référence des 70's et que j'avais personnellement découvert via l'instrumental « Child's Anthem », un must du Classic Rock. On reste en 1978 avec le tube « Hold The Line », marque de fabrique du son Toto et mètre-étalon du rock californien. On passe au second album avec le chaloupé « 99 » que Steve L. présente avec humour comme une position du Kamasutra « oubliée » et qui rappelle Boz Scaggs avec qui les fondateurs de Toto ont beaucoup collaboré dans les années 70. Petit saut d'une dizaine d'années avec « Pamela » que Steve L. présente comme une ex-petite amie de Joe W. et en profite pour placer une petite blague salace que je préfère taire ici. On sent bien que Joe a quelques difficultés aujourd'hui pour pousser dans les aigues et que parfois la justesse laisse un peu à désirer mais bon ça passe encore. Pour lui permettre de reposer son organe vocal, le groupe enchaîne sur l'instrumental et très jazz-rock « Jake To The Bone » qu'on croirait tout droit issu du répertoire de Jeff Beck et que Steve L. dédie aux 2 frères Porcaro décédés, Jeff et Mike. Greg se retrouve ensuite seul au piano pour l'intro de la magnifique ballade « I Won't Hold You Back » de l'album « IV » avant de basculer sur un morceau beaucoup plus récent, « Burn » du dernier album studio en date « XIV » sorti il y a maintenant près de 10 ans. Sublime moment ! On continue avec une autre ballade « I'll Be Over You » qui fut un énorme succès aux Etats-Unis en 1986, à l'époque où Joe les avait rejoints pour l'album « Fahrenheit » mais là c'est Steve L. qui chante. Autre tube, de « The Seventh One » cette fois, « Stop Loving You » permet au septet de faire remonter la température dans la salle. Puis Steve L. nous rejoue sa reprise de « Little Wing » en hommage à Jimi H. et à S.R.V., c'est bien mais un peu du « réchauffé »... Retour au tout premier opus avec le très apprécié « I'll Supply The Love » et son accélération finale qui voit la guitare de Steve et les claviers se lancer dans un duel musical jubilatoire. Comme sur l'album de 1978, on enchaîne sur le groovy « Georgy Porgy » ; on peut juste regretter l'absence de choristes qui à l'époque donnaient la réplique à Steve L. sur scène à l'instar de Cheryl Lynn sur la version studio de ce brûlot. C'est maintenant l'occasion de rendre hommage à Greg qui vient de reprendre son rôle de claviériste au sein du groupe avec un titre de l'album « Falling In Between » de 2006, le premier sorti sur Frontiers et celui qui avait vu l'arrivée de Greg chez Toto, « Dying On My Feet » co-écrit avec lui. C'est d'ailleurs la première fois, à l'occasion de cette tournée 2024, que les Américains la reprennent sur scène et c'est un très bon choix. Steve L. présente ensuite les musiciens et vu leur pedigree cela donne lieu à de courtes jams sur des intros mémorables comme « Beat It » de qui on sait, « I Keep Forgettin' » de Michael McDonald ou encore « Hakuna Matata » dont la voix originale de la chanson du « Roi Lion » n'est autre que celle de Joe Williams. Autre heureuse surprise c'est la version très enjouée de « Home Of The Brave » de « The Seventh One » qui permet à Warren de briller à la flûte et au chant sur quelques couplets. Je serai beaucoup moins indulgent quant à la reprise malheureuse du « With A Little Help From My Friends » des Beatles. La voix de Joe ne s'y prête absolument pas surtout en fin de concert et on est bien loin de l'interprétation inégalable du grand Joe Cocker de ce morceau notamment sur « Mad Dogs & Englishmen ». Comme il se doit le concert se termine avec les 2 titres que sont « Rosanna » et « Africa » et cela donne lieu comme à chaque fois à la sortie massive des smartphones pour immortaliser ce moment. A croire que 99% du public n'est venu que pour ça ! Je trouve toujours ce moment un peu triste car Toto ne se résume pas qu'à ces 2 tubes...
Au final un concert sympathique mais qui aurait pu se prolonger d'une bonne demie-heure comme ce fut le cas en 2018 avec quelques morceaux incontournables comme « English Eye », « St George And The Dragon » ou « White Sister » (ma préférée). Musicalement ça frise toujours la perfection mais on pourrait s'attendre à un peu plus d'énergie et de folie sur scène comme c'était le cas dans les années 80 car là ça ronronne un peu et la prise de risque est minimum...
Merci à Hugo, Sabrina et Simon...